LE CARNAVAL DE VENISE
UN OPÉRA-BALLET DE CAMPRA
Cet opéra-ballet d’André Campra nous offre un parfait divertissement à la française avec pour toile de fond le mythique et légendaire Carnaval de Venise, la nouvelle création de la co[opéra]tive.
Évidemment, l’intrigue se déroule à Venise, sur la Place Saint-Marc, entre les canaux, sous les balcons des Palais. Il est question d’amours contrariées : Léonore aime Léandre qui préfère Isabelle et Rodolphe est lui aussi amoureux d’Isabelle. La vengeance s’invite, quelques masques et tous ces ingrédients stimulent le génie et l’univers de Clédat et Petitpierre.
Le Carnaval de Venise est un opéra de Campra créé en 1699 à l’Académie Royale de Musique. Emblématique de la musique française des 17e et 18e siècles, et plus encore de ce genre de divertissement si propre à la Cour de France qu’est l’opéra-ballet, il s’agit toutefois d’une œuvre unique par la mise en abîme de la forme opératique qu’elle provoque, en faisant surgir le théâtre dans le théâtre, en mêlant le chant italien au chant français, en combinant avec finesse les registres merveilleux, dramatiques et comiques. La co[opéra]tive s’empare de ce chef-d’œuvre dont la fraicheur et la légèreté n’ont pas souffert des siècles pour faire vivre ce répertoire dans le réseau des scènes pluridisciplinaires où il est si rarement présenté du fait des effectifs qu’il implique.Ce chef-d’œuvre de l’opéra français combine avec finesse et audace les registres dramatiques et comiques.
Opéra-ballet en 1 prologue et 3 actes de André CAMPRA (1660-1744)
Créé le 28 février 1699 à l’Académie Royale de Musique (Opéra de Paris)
Livret de Jean-François REGNARD
Nouvelle production, première en janvier 2025 au Théâtre Ledoux / Les 2 Scènes, Besançon
Camille Delaforge direction musicale
Yvan Clédat et Coco Petitpierre mise en scène, scénographie et costumes
Sylvain Prunenec chorégraphie
Yan Godat création lumières
Lucile De Trémiolles cheffe de choeur
Anne Tesson assistante costumes
Françoise Lebeau assistante mise en scène
Baudouin Woehl assistant dramaturge
Isabelle Victoire Bunel
Léonore Anna Reinhold
Orphée David Tricou
Léandre, Le Carnaval Sergio Villegas Galvain
L’Ordonnateur, Rodolphe,
Pluton Guilhem Worms
Chœur Apolline Raï-Westphal, Clarisse Dalles, Louise Roulleau, Laura Jarrell, Benoît-Joseph Meier, JordanMouaissia, Léo Guillou-Keredan, Alexandre Adra
Danseurs Marie-Laure Caradec, Maxime Fossati, Julien Gallée-Ferré, Marie-Charlotte Chevalier, Sylvain Prunenec
Ensemble Il Caravaggio
Représentation :
TOURCOING, Théâtre municipal Raymond Devos
samedi 01 mars 2025 – 18h
dimanche 02 mars – 15h30
TARIF A
1e série TP 30 € | TR 26 €
2e série 15 €
– 28 ans 10€ / – 18 ans 6€
Durée : env. 2h10
Visuels : Scène de carnaval ou le Menuet ©️ Grand Palais RMN (Musée du Louvre) photo Franck Raux / Clédat & Petitpierre ©Yvan Clédat / © Julien Benhamou
Fabrication décors et costumes, Opéra de Rennes Production de la co[opéra]tive
Les 2 Scènes / Scène nationale de Besançon, Théâtre Impérial – Opéra de Compiègne,
Théâtre de Cornouaille / Scène nationale de Quimper, Opéra de Rennes, Théâtre Sénart / Scène nationale, Atelier Lyrique de Tourcoing
Centre de musique baroque de Versailles, Ensemble Il Caravaggio
Avec le soutien de la Caisse des Dépôts et Consignation mécène principal de la Co[opéra]tive
Autres partenaires de diffusion :
Le Quartz / Scène nationale de Brest, L’Équinoxe / Scène nationale de Châteauroux, MC2 : Maison de la Culture de Grenoble / Scène nationale
Clédat & Petitpierre
Metteur.e.s en scène
QUELQUES MOTS SUR LE CARNAVAL DE VENISE
Le Carnaval de Venise est une œuvre qui, sous la forme du divertissement, nous apparaît questionner la forme opératique, et où les personnages semblent au centre d’un projet plus vaste et, pourrait-on dire, plus conceptuel. C’est ce questionnement sur le médium lui-même qui résonne en nous de manière très contemporaine, malgré les trois siècles qui nous séparent de l’œuvre originale. Dès le prologue, où des ouvriers secondés par Minerve et les génies des Arts se pressent de finir le décor pour que la représentation puisse commencer, jusqu’à l’Orfeo, petit opéra dans l’opéra en italien. Il nous a plu de sentir que les auteurs jouaient avec la forme opératique tout comme ils jouaient avec les attentes du public de l’époque. Comment ne pas s’interroger sur les intrusions dansantes des barque- rôles et autres bohémiens qui stoppent net les protagonistes dans leur effusions senti- mentales ? Comment ne pas être attiré par ce stupéfiant prologue et cette mise en abîme du théâtre dans le théâtre ? Comment aussi de pas s’amuser d’une déesse transformée en régisseuse de plateau ?
Le carnaval de Venise (la fête) a été relancé très récemment, et de ces réactivations touristiques et kitch nous avons retenu le foisonnement des éléments de mercerie : dentelles, rubans nacrés, glands dorés. Il nous a plu de convoquer toutes ces matières pour venir les déposer sur une multitude de sphères de toutes tailles, un peu comme une réduction anamorphosée du carnaval. Au centre du plateau, un labyrinthe circulaire (faisant aussi écho au système solaire et aux orbites des planètes) nous offre de multiples possibilités pour composer l’espace du plateau et les trajectoires des protagonistes. Des glands géants, éléments de mercerie dont nous aimons et la forme et le nom, descendent également des cintres pour venir figurer l’intérieur de la salle des réduits et redessiner l’espace de la scène.
Dans notre projet, la danse n’est pas convoquée comme une simple figuration de la liesse, pas plus qu’elle n’est baroque. Cinq polichinelles rieurs, bossus et ventrus (tels que ceux peints par Tiepolo) sont au cœur du travail chorégraphique que nous allons développer avec Sylvain Prunenec. Nous les imaginons formant une petite tribu, parfois lascifs et rêveurs (ou même endormis) parfois dansants et envahissants, ils sont présents en permanence au plateau ou dans sa périphérie : la fosse, les gradins, ou encore le hall du théâtre à l’entracte. Comme autant de traits d’unions avec le 17e siècle ces polichinelles n’ont jamais quitté le lieu de la représentation. Ils y vivent, y dorment et y dansent depuis bien longtemps… Tour à tour acteurs et spectateurs de la pièce, ils s’amusent à multiplier les niveaux de lectures, tout comme Campra et Regnard mettent en abîme le prologue ou le mini Orfeo.
Les opéras-ballets furent des divertissements créés en réaction à la gravité et par- fois la lourdeur des tragédies lyriques. Nous avons, avec Camille Delaforge, l’envie commune de retrouver cet esprit joyeux et cet enchantement, mais aussi la porosité qui existait alors entre la salle et la scène. Nos polichinelles tiendront ce rôle, tout comme les chanteurs qui, à l’entracte et avec la complicité de Camille, quitteront le plateau pour venir interpréter dans les halls des théâtres des chants traditionnels napolitains dont ils sont par ailleurs coutumiers.
Puisant comme à notre habitude dans le grand corpus visuel de l’histoire de l’art des éléments qui nous sont chers pour les modifier, les simplifier, les faire nôtres, nous imaginons avec délice les silhouettes blanches de ces polichinelles, ou encore les motifs des arlequins de la commedia dell’arte. Ces figures et motifs archétypaux appartiennent encore aujourd’hui à notre imaginaire commun, et nous souhaitons librement nous les réapproprier pour mieux réinventer le jeu, l’humour et la beauté que le carnaval de Venise offrait à ses contemporains.
Camille Delaforge,
directrice musicale
Ouvrage unique en son genre, le Carnaval de Venise de Campra et Regnard répond à une problématique intemporelle : comment faire de l’Opéra le divertissement par excellence. C’est sur ce postulat que s’appuie Campra pour créer un ouvrage à la structure unique, puisqu’elle associe la tragédie lyrique et l’opéra-ballet pour créer un opéra-comique rassemblant intrigue amoureuse, airs français et italiens, danses variées, tout cela dans l’univers exotique et fantasmé de la période du Carnaval à Venise.
En 1699, à l’aube des Lumières, l’on s’ennuie à la cour. Le vieux roi Louis XIV représente l’art de la grande tragédie lyrique portée pendant des décennies par Lully. Le Dauphin et la cour cherchent alors à renouveler le divertissement, tandis que les italiens, chassés par Lully quelques décennies plus tôt, retrouvent quelques entrées musicales, notamment par le genre de la Sonate.
Intemporel également, le financement des théâtres est un enjeu majeur de ce siècle (comme du nôtre !). Les loges des théâtres sont privées, réservées à l’année et donc pré-payées. Le parterre, uniquement masculin (on y reste debout pendant des heures, cela ne sied guère aux dames), reste la variable d’ajustement des finances des théâtres. Il s’agit donc de créer un spectacle attrayant pour ce parterre d’hommes, que l’on a ajusté à hauteur des chevilles dévoilées des danseuses et chanteuses de la scène.
C’est ce spectacle que créent (entre-autre) Campra et Regnard en 1699 lorsqu’ils mélangent l’histoire d’amour du quatuor principal à une forme de théâtre dans le théâtre, en faisant entendre à la fin du troisième acte un court opéra en italien sur le thème de l’Orfeo, justifié dramatiquement comme étant le spectacle pour les festivités du couple heureux des actes précédents. Enfin, le Carnaval de Venise se termine en français par un grand bal annoncé par le personnage du Carnaval en personne.
Cet opéra-comique est unique et le restera puisque cette forme ne trouvera aucun miroir pendant le siècle suivant.
Lorsque la Co[opéra]tive m’a proposé cette collaboration, j’ai tout de suite pensé à cet ouvrage. En France, il a été mis en scène une seule fois en 1975 à Aix-en Provence et jamais rejoué depuis. Cet ouvrage propose un assemblage de musique française et italienne dans un savoureux mélange d’airs sérieux et de musique de ballet. Il rejoint ainsi l’ADN d’Il Caravaggio qui explore l‘Opéra italien et français du baroque à la période classique, ainsi que la dimension populaire dans les ouvrages opératiques. Cette œuvre nous permet de réfléchir à la réception d’un divertissement selon les codes d’une époque (ici à l’orée du siècle des Lumières) et à la façon dont on peut l’amener à rencontrer le public d’aujourd’hui.
Par ailleurs, la mise en lumière de jeunes chanteurs lyriques, leur permettant ainsi de profiter d’un rayonnement artistique, est pour moi un enjeu enthousiasmant, tant la rencontre entre la jeune génération de chanteurs lyriques et les jeunes chefs est primordiale. Accompagné par Clédat et Petitpierre, qui signent ici leur première mise en scène d’opéra, l’Ensemble Il Caravaggio se lance aussi dans sa première production d’opéra, fort de nombreuses aventures lyriques et baroques dans les dernières années.
En savoir plus sur Camille Delaforge en écoutant l’émission de Radio France du 30/10/24 qui lui est consacré : Camille Delaforge : « Les femmes cheffes d’orchestre apportent un regard neuf sur ce métier de direction »